S1 : Industrie 4.0 as a service, concentration & résistance à l’ubérisation

Description générale 

 

Les industriels orientés vers l’économie de la fonctionnalité et une industrie 4.0 tirée par les grands groupes.

D’ici à 2030, en France, les consommateurs accentuent leurs attentes de toujours plus de consommation et d’immédiateté, mais ils se tournent moins vers la possession que vers l’usage. Ils sont de plus en plus prudents quant à la gestion de leurs données et sont réticents à les confier sans restriction et contrôle aux acteurs économiques. Dans ce contexte en forte évolution, la plupart des grands groupes industriels ont innové en disruptant leurs modèles économiques traditionnels et en s’orientant résolument vers l’économie de la fonctionnalité. Ces évolutions sont venues renforcer encore la tendance à la digitalisation des process de production et de distribution. En corolaire, les ressources humaines sont en recul en nombre.
Ainsi, la plupart des acteurs industriels, grands groupes comme PME ont investi sur la période 2020 - 2030 de façon significative dans la transformation numérique dans un contexte de taux d’intérêt bas. Mais ce sont les plus grands groupes, au détriment de la plupart des PME industrielles et des groupes les plus fragiles, à force de concentration, aux différentes échelles territoriales (régionales, nationales, européennes) qui sont parvenues à capter la grande majorité des ressources financières nécessaires à cette métamorphose digitale. Les quelques acteurs industriels de taille plus modeste qui sont parvenus à maintenir leurs positions se sont appuyés sur des aides publiques en particulier celles apportées par les régions dotées d’une politique industrielle ambitieuse, malgré les effets de l’industrie 4.0 sur l’emploi direct.

 

L’ubérisation de l’industrie 4.0 versant production n’a pas eu lieu !

Les groupes industriels ont bien résisté durant la décennie 2020-2030 aux risques d’ubérisation et ce malgré un contexte européen toujours très favorable aux GAFAM par manque de coordination entre les différents États et son incapacité à limiter l’évasion fiscale.
Pourtant au début des années 2020, on pouvait craindre l’ubérisation de la production avec la montée en puissance de l’IoT (internet des objets) et du big data. Mais cela n’a pas été le cas en raison de multiples facteurs : le manque de coopération entre industriels et plateformes freinant l’émergence de normes et l’interopérabilité des systèmes, la réticence à partager les données entre acteurs économiques, les crises régulières liées à la cybersécurité. Au total, l’industrie 4.0 a limité l’IoT à usage interne et le Big data est resté centré sur les données restreintes en interne sans ouverture aux pure players du numérique.

 

Une ubérisation partielle de la distribution traditionnelle et l'émergence de nouveaux modèles de plateformes

C’est en fait l’ubérisation de la distribution traditionnelle qui s’est accélérée tout au long de la décennie. La supply chain est désormais coordonnée par de grands opérateurs de plateformes (groupes industriels et pure player) qui permettent l’optimisation de la logistique. Les PME-PMI n’ont pas cette posture de coordination mais participent à la sécurisation et à la traçabilité de la supply chain en investissement dans les nouvelles technologies en particulier la blockchain. Ce déclin rapide de la distribution traditionnelle a été accéléré, en particulier dans le BtoC, par le développement de l’usage de la blockchain et des smartcontracts dont se sont emparés largement les PME industrielles.
À côté des grands acteurs de la logistique, on constate une forte dynamique d’innovation avec la création de nombreuses plateformes par des start-up. Celles-ci sont largement financées par les investisseurs institutionnels, par les géants de l’internet, des incubateurs et des plateformes d’investissements. Paradoxalement, cette ubérisation de l’aval, contrôlée en grande partie par les pure players, a bénéficié aux industriels y compris à certaines PME qui accèdent plus rapidement au client final et répondent mieux à ses besoins en termes de produits et de services attendus.

Macro-variables Hypothèses
Attentes et comportements du consommateur /citoyen  Les consommateurs souhaitent consommer immédiatement sans effort afin d’augmenter leur temps libre. Les industriels organisent leur logistique pour satisfaire cette tendance tout en la stimulant grâce aux technologies. Les processus logistiques fondés sur l’instantanéité menacent le modèle de distribution classique (hypermarchés, etc.). L’accès aux données privées qu’impose ce modèle pourrait être contesté par les consommateurs.
Modèles économiques L'économie de la fonctionnalité devient le modèle dominant. La valeur générée prend la forme de locations et d’abonnements notamment et est produite par quelques grosses entreprises, capables de repérer des individus de talent. Ces entreprises font de la maintenance de leurs biens un élément crucial de leur modèle économique. Une meilleure gestion des ressources est donc opérée, tendant vers une stabilisation de la croissance.
Régulations Europe La lourdeur du système de régulation  limite le rapport de force de l'Europe face au GAFAM (fiscalité, droit du travail) et son efficacité dans les secteurs de l’industrie et de l’environnement. Au niveau industriel :  il y a un manque d’appropriation (connaissance et temps long pour constituer un dossier) par les PMI. Au niveau environnement ; l’UE reste précurseur mais l’application des réglementations est très nuancée selon la volonté nationale. Idem pour la fiscalité et la RGPD (contraignante en France mais variable selon les pays).
Données (IA, Big data, IoT) Les entreprises  sous-traitent leur exploitation de données auprès des plateformes qui voient leur pouvoir s’accroître.  Forte croissance des marchés big data et IoT. L’ensemble des technologies se développent aisément grâce à l’émergence d’infrastructures sobres en énergies et une coopération efficace des différents acteurs qui favorise l’interopérabilité des systèmes et le renforcement de la cybersécurité.  L’IoT se déploie massivement dans l’industrie  alors que le big data se heurte encore à certains freins.
Interactions (Blockchain, BOT) La BC et les smart contracts se déploient massivement grâce à une technologie simplifiée et plus sobre en énergie. Mouvement de « tokinisation » de l’économie et importantes levées de fonds via ICO. Les acteurs traditionnels tentent de rattraper leur retard et la majorité des plateformes C to C se font ubériser. Les BOT de seconde génération se diffusent massivement.
Acteurs de la numérisation (Géants internet, plateformes numériques, start-ups)  La convergence entre technologies disruptives promue par les leaders de l’internet et des industriels favorise la création de nouveaux modèles d’affaires. Les industriels s’approprient ces technologies et reconfigurent leurs processus de production, devenant acteurs des innovations technologiques. Partage des ressources et des informations entre industriels.
Amont/Aval La supply chain est coordonnée par un ou des acteurs dominants (plateformes) avec une tendance d’intégration entre amont et aval. L’axe logistique poursuit son optimisation par l’utilisation des technologies avec l’enjeu renforcé de traçabilité. La digitalisation du commerce s’accentue mais les objets physiques sont d’autant plus nombreux que le service se digitalise. La distribution multimodale devient plus forte avec des considérations écologiques. Mais l’optimisation de la supply chain prime sur l’objectif écologique. 
Situation économique et financière Les entreprises investissent massivement dans le numérique dans un contexte de taux d’intérêt  bas. Les leaders sur les marchés financiers absorbent les groupes industriels comme des éléments de diversification de leurs portefeuilles d’actions. La déconnexion entre valeurs de production et valeurs financières se poursuit. Une croissance faible mais continue de l’économie réelle se maintient, du fait de la numérisation de l’industrie. 
Politiques de soutien à la transformation digitale L’Etat élabore une stratégie de communication visant à sensibiliser l'ensemble des entreprises à la transformation digitale. Les pouvoirs publics augmentent le budget alloué aux régions et aux PME sur les questions de la digitalisation. Le nombre d’initiatives R&D mêlant fonds publics et fonds privés augmente et les universités développent des pôles de compétences sur les questions digitales.
Modes de production L’orientation de la production est tournée vers les process automatisés, standardisés pour produire plus et plus efficacement.  Les emplois des entreprises sont majoritairement non-humains; le peu d’humains encore présents ont des tâches en lien avec les process et leur maintenance. 
Industriels et politiques européennes  Les tensions politiques impliquent un recentrage des dynamiques industrielles au niveau des continents : Europe, Amériques, Asie. L’Europe confirme son recul. L’augmentation des coûts de transport implique la relocalisation des industries. Les usines appartiennent à des grands groupes, sont numérisées, regroupées par zones de compétitivité. Les industriels privilégient des investissements sur l’avenir,via notamment les aides des pouvoirs publics.
Métiers et formation Le besoin en compétences accentue la ségrégation du marché du travail et les nouvelles formes d’emploi créent plus de précarité. De nouveau acteurs de la formation apparaissent (plateformes) pour répondre aux  besoins de l’industrie. La flexibilité et l’intelligence de la production s’accroissent avec une accélération des transactions et des prises de décision (résultat de l’automatisation des processus de base, des processus avancés et des activités cognitives).

 

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